la fleur devant le message

Le mot de Yashimura

Kenichi YOSHIMURA est japonais. Arrivé en France en 1970 (il était alors 4è Dan de Kendo), il s'est très vite intéressé au Kendo français, et a été l'un des acteurs essentiels de son développement pendant 30 ans. Aujourd'hui 8è Dan Kyoshi de Kendo, 6è Dan de Iaido, il est aussi Directeur Technique National du Kendo et du Chanbara, auprès du Comité National de Kendo (CNK/FFJDA). Membre de nihon Bijutsu Token Hozon Kyokai et de Nihon Token Hozankai

J'ai tenté de l'expliquer brièvement aux assises de Dijon et au congrès national extraordinaire à Paris, mais je sais que beaucoup d'entre vous restent sceptiques, ce qui est tout à fait compréhensible. Je comptais laisser aller les choses en pensant que tôt ou tard, les pratiquants finiraient par le comprendre Mais il y a quelques jours, j'ai fait une découverte très intéressante, que je voudrais vous rapporter, au cours de la lecture d'un livre; "Itto-ryu Gokui" (Essence d'Itto-Ryu) publié en 1965 par Maître SASAMORI Junzo (1886-1976), maître successeur de l'école d'Itto ryu, que tous les grands maîtres japonais actuels connaissent et dont certains ont été les disciples. Voici les deux passages qui nous intéressent: (p332-333)

Utilisation du " fukuro shinai" On choisit un bâton de bambou de 90 cm de long et de 3 cm de diamètre, on le fend en 32 lames sauf la partie du manche, on le recouvre d'une gaine de tissu (fukuro) et on place une tsuba à la séparation de la lame et du manche. Avec ce fukuro shinaî, on apprenait aux élèves d'abord la série entière des figures du Kumidachi (kata) en respectant l'ordre d'exécution des attaques - défenses jusqu'à ce qu'ils les assimilent complètement. Puis, on leur laissait faire des assauts libres, entre eux, sans s'occuper des ligures codifiées.

Ainsi, l'école Ryu apprenait, avec le fukuro-shinai les kumidachi "Juniten Makikaeshi" ou "Kyuko no rachi" aux élèves sans protection et leur permettait des assauts libres, ce qui intéressa beaucoup de monde et cette méthode fit très rapidement augmenter le nombre de pratiquants. Le fukuro shinai est très pratique pour l'entraînement, car il permet de frapper réellement le partenaire sans le blesser, et on arrive à apprendre efficacement l'attaque-défense et des différentes techniques physiques et mentales. Son utilisation convient pour les enfants, les débutants et les femmes ainsi que pour les pratiquants exercés; comme il n'y a pas de protection, les frappes sont réelles, sincères et proches de celles du combat réel, ce qui permet aux pratiquants d'atteindre un très haut niveau. (p335-336).

Dans la pratique du kendo avec protection, les frappes hors protection ne sont pas reconnues comme points valables. Ainsi, l'adoption de la protection qui est pratique pour l'entraînement a complètement transformé les techniques du sabre qui, au départ, dans des conditions extrêmes, déterminaient la vie ou la mort et en a fait un sport qui réglemente les parties du corps à frapper. Autrement dit, le kendo interdit certaines techniques qui étaient utilisées avec un vrai sabre telles que viser les fentes de l'armure ou du casque, trancher les articulations, transpercer en passant sous l'armure, etc.

L'armure d'aujourd'hui conditionne la pratique; en outre, le kendo, en garantissant la sécurité de la pratique, a laissé se créer des gestes impossibles avec un vrai sabre : poser son shinaï sur l'épaule ou le bras de l'adversaire, le coincer sous son bras, pencher la tête pour éviter de recevoir le coup sur le casque mais le recevoir sur la carotide à la place. Naturellement ce n'est pas l'ippon, puisque c'était sur le cou et non pas sur la tête. Evidemment ce n’ai pas le Kote ippon non plus, puisque c’était le point, le coude, le bras trop haut... Bien sûr, je ne suis pas battu, puisque le stuki était au cœur non pas à la gorge Les règles du combat de kendo qui utilise l'armure et le shinaï sont vraiment très éloignées de la réalité du vrai combat guerrier et, même le dénaturent. Si vous voulez apprendre un kendo réellement traditionnel, d'une dimension plus élevée, plutôt qu'un sport, vous devez absolument apprendre les kumidachi des vieilles écoles qui nécessitent l'utilisation du vrai sabre, le hahiki (le sabre dont le tranchant est arrondi) et le bokuto

Après cette lecture, j'ai conclu que je voyais finalement juste en trouvant de l'intérêt au sport chanbara; sa pratique chez les débutants mise à part, une pratique de qualité doit se placer entre les kumidachi des vieilles écoles et le kendo d'aujourd'hui. C'est effectivement ce que j'ai senti quand je l'ai pratiqué. Le fukuro-shinai souple cité dans les passages ci-dessus n'est rien d'autre que le bâton du chanbara! Déjà avant 1965 Maître Sasamori déplorait la dénaturation sportive du kendo ! Ce n'est plus le propos du petit Yoshimura, mais celui du grand Maître Sasamori. je suis encore plus persuadé aujourd'hui que la pratique d'un sport chanbara de qualité nous permettra de retrouver les éléments presque disparus du véritable combat au sabre. 'Tous les gestes physiques sont déterminés, limités ou modifiés par l'équipement ou le matériel qu'on utilise, indépendamment de notre volonté. Le kendo d'aujourd'hui a sa parfaite raison d'être et je suis le premier à l'admirer. Mais il ne faut pas fermer les yeux sur l'apparition de pratiques indésirables dans le kendo (surtout au Japon et chez quelques Français contaminés !) à cause de cette contrainte matérielle. Pour moi, pratiquer de temps en temps le sport chanbara compensera les défauts du kendo d'aujourd'hui.

Pour préserver la qualité d'une discipline traditionnelle, il faut toujours se référer à son origine. Le sport chanbara, contrairement à son apparence et son appellation modernes est plus proche du kumidachi que le kendo, et il servira ainsi de pont entre le kata et le kendo que l'on a du mal à rapprocher. Je suis persuadé que la pratique Kata-chanbara-kendo nous donnera un équilibre et nous fera mieux comprendre la voie du sabre.

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